Le nom de Villefranche-de-Rouergue (en occitan : Vilafranca de Roergue) évoque avant tout son marché réputé à cent lieues à la ronde, voire davantage ! Les gens viennent de loin et s’y pressent le jeudi, et surtout le samedi. Ici, pas de revendeurs, on n’y vend que de la production locale. Tous les producteurs présentent et vendent leurs produits au milieu de l’effervescence du lieu : volailles, fruits et légumes de saison, miel, safran, fromages, fleurs, farçous à déguster sur place…
Située au centre d’un triangle formé par Albi, Cahors et Rodez, Villefranche-de-Rouergue est classée « grand site de Midi-Pyrénées » ainsi que « ville d’art et d’histoire » avec le « pays des bastides du Rouergue ». Comme Najac, cette bastide royale fut fondée en 1252 par Alphonse de Poitiers, frère du roi Saint Louis et héritiers des comtes de Toulouse. Il y transféra le siège de son administration et Villefranche-de-Rouergue fut dotée de franchises et d’exemptions fiscales.
« Une bastide est une ville nouvelle du Moyen Age, ville royale non fondée par le roi mais vassale du roi de France », explique Daniel Brillet, guide-conférencier. « Et seuls étaient admis dans les bastides les hommes libres de toute attache féodale. Les bastides possèdent un consulat, un marché, des foires, une milice… ». Entre 1220 et 1373, plus de 300 bastides furent créées dans le Sud-Ouest de la France.
Ville de riches marchands et de noblesse de robe provinciale
Villefranche-de-Rouergue, c’est : 125 rues et ruelles, 1014 immeubles et 17 monuments classés aux Monuments historiques.
Avec ses rues et ruelles au caractère typique, la Bastide est non seulement l’une des plus grandes de France, mais aussi l’une de celle qui a le mieux conservé son plan d’urbanisme médiéval : dédale de rues se coupant en angles droits et menant toutes vers la place centrale, maisons en encorbellement qui permettaient de gagner de l’espace tout en payant moins de taxe… Les maisons des bastides étaient séparées par des venelles ou andrones. Ce système d’égouts créé au Moyen-Age utilisait l’espace volontairement laissé entre deux maisons, appellé aussi « la double ».
L’alignement des façades se fait sur celui de la rue. Les constructions s’élèvent tout en verticalité. Au sein des maisons, les étages seront occupés par des populations de classe sociale différentes : les premiers étages par les bourgeois ou les artisanats et les gens moins aisés vivent dans étages les plus élevés. Les rez-de-chaussée des maisons des rues commerçantes offrent de belles devantures en bois anciennes. Sous les maisons à étage, les caves, dont certaines sont voûtées, empiètent parfois sous la rue. Les intérieurs de nombreuses maisons du centre-ville conservent de très beaux éléments d’architectures tels que de belles cheminée Renaissance, des plafonds à la française ou encore des escaliers datant des XVIème, XVIIème et XVIIIème siècles. Certaines maisons comportent également des cours intérieures ou des loggias.
La place Notre Dame, poumon de la ville
Lieu de rencontres et poumon de la ville, la belle place Notre-Dame occupait jadis le centre de la ville et était préservé pour les échanges commerciaux. Tout autour, les arcades construites dès 1276, forment des couverts qui protégeaient, entre autres, les marchandises des intempéries. Une halle s’y trouvait également sous laquelle biens et marchandises étaient pesés, avant d’être taxés par un représentant consulaire.
Au-dessus des arcades, on peut admirer les plus importantes demeures de la fin du Moyen âge, de la Renaissance, ainsi que des hôtels particuliers des XVIIème et XVIIIème siècles. « Les fenêtres ne sont pas de style Renaissance, comme on pourrait le penser, mais de style gothique. Certaines sont encadrées de bâtons écottés », explique le guide qui désignant des moulures en forme de branches émondées.
Arrivé aux aurores le matin, Quentin Bourdy a déjà fait son tour de marché et effectué son choix parmi la diversité des produits du terroir, notamment chez Martin et Guillaume Cayrade qui tiennent un étal coloré et bien achalandé “L’arrogance des légumes”. Régal pour les yeux et les papille, ces légumes de saison seront apprêtés par le Chef et servis aux menus de son restaurant l’Univers.
La collégiale Notre-Dame
Achevée la fin du XVème siècle, la collégiale présente un portail encastré dans un impressionnant clocher-porche. Fruit d’un long chantier (XIIIe-XVe) interrompu par la peste noire (environ 3’000 personnes meurent) et le début de la guerre de Cent Ans, cette église classée Monument historique, est dotée d’une nef unique, caractéristique du gothique méridional. Au fond de l’église, les stalles en bois sculpté du xve siècle, chef-d’oeuvres du sculpteur André Sulpice, sont représentatives de tout un monde médiéval mêlant fantasmes, animaux fantastiques,personnages truculents, scènes de la vie quotidienne… La chaire à prêcher en pierre date du xve siècle. L’autel en marbre polychrome et en bois doré, du XVIIème siècle.
Classé monument historique en 1976, le buffet d’orgue surprend par ses éléments de style « gothico-classique » (il n’y a qu’une dizaine d’orgues à buffet gothique en France). Les premiers orgues ont été installés dans la collégiale en 1433. Puis, il fut remanié vers 1845 par Théodore Puget qui a réutilisé six jeux anciens. Il comporte 18 jeux répartis sur 2 claviers et un pédalier.
Autres surprises après avoir gravi les 163 marches menant au clocher : le point de vue époustouflant et imprenable sur la bastide. Et le carillon constitué d’un jeu exceptionnel de 48 cloches, dont 7 de volée, toutes réalisées par Paccard, célèbre fondeur à Annecy-le-Vieux. Anglade, le dernier carillonneur aveugle, montait plusieurs fois par jour à la salle des cloches. Il est décédé en 1961, année de l’électrification du carillon qui a entraîné la suppression du clavier. Ce carillon, un des plus beaux de l’Occitanie, se fait entendre tous les 4ème dimanches de chaque mois, selon disponibilité des carillonneurs bénévoles. Egalement des airs d’hier ou d’aujourd’hui, religieux ou laïques, avec l’automate, à midi, et chaque jeudi matin toutes les 20 minutes à partir de 9h.
La « Perle du Rouergue », lieu d’échanges
L’ancienne chapelle des Pénitents Bleus construite entre 1674 et 1682, placée sous le vocable de Saint Jérôme. Cette confrérie était composée de laïcs et de religieux, et ses membres reçurent le parrainage de Louis XIV. La chapelle fut vendue pendant la Révolution et la confrérie disparaît en 1905. Aujourd’hui le bâtiment est devenu la bibliothèque municipale.
La fontaine monolithique de la place de la Fontaine, la bien-nommée. Dans les bastides, les points d’eaux assuraient les besoins en eau potable et permettaient l’emploi de la force hydraulique ou encore le ravitaillement en eau pour les animaux. Au cœur de la ville, on retrouve cette belle fontaine du griffoul a été édifiée dès le XIVème siècle.
Depuis près de huit siècles, la place Notre-Dame est un rendez-vous incontournable de la vie villefranchoise, où se concentraient autre fois les activités économique, politique et judiciaires. La ville vit aujourd’hui au rythme des marchés – parfois nocturnes – , brocantes, concerts et rendez-vous culturels. Aux accueillantes terrasses des cafés et des restaurants, des anciens y parlent encore occitan… Installée en 2013 au centre de la place, la fontaine donne l’heure : pour les heures, comptez le nombre de jets en marche, pour les minutes, ce sont 60 petites lampes centrales, de couleur orange, qui égrènent le temps.
Villefranche a toujours été un lieu d’échanges, prospérant autour de son commerce et de son artisanat. Avec près de 300 commerces et services en activité, le centre-ville bénéficie en outre d’un tissu commercial exceptionnellement dense. Villefranche et sa Bastide attirent chaque année plusieurs dizaines de milliers de touristes.








Villefranche-de-Rouergue
http://tourisme-villefranche-najac.com/
www.tourisme-aveyron.com
( Texte et Photos – sauf H. Panassié : Françoyse Krier )