L’association du Musée du Vieux Pays-d’Enhaut a été fondée en 1922. En 1931, l’Association héritait du bâtiment actuel du musée contruit vers 1880. Tous les collaborateurs de ce musée ont travaillé bénévolement et, peu à peu, ont fait de ce musée local qui se consacre à la sauvegarde du patrimoine artisanal et culturel de cette région si attachante, l’un des musées d’art les plus riches de Suisse.
Le Musée du Vieux Pays-d’Enhaut à Château-d’Œx possède quelques 4’000 objets liés à la vie quotidienne et constitue un acteur d’importance dans le paysage culturel régional. Conscient des transformations qui s’opèrent dans le Pays-d’Enhaut sur le plan touristique et culturel et de son patrimoine immatériel national – le découpage – le musée souhaite élargir son champ d’activité et devenir le centre suisse du papier découpé.
Le Musée du Vieux Pays-d’Enhaut s’est mué en Musée du Pays-d’Enhaut, Centre suisse du papier découpé. Un projet scientifique et culturel a été mis en place qui définit l’avenir du musée dans les dix prochaines années.
(Image du haut : Découpage historique « Bouquet de fleurs », 1946, de Louis David Saugy, collection de Hans-Jürgen Glatz, Blankenburg)
Métiers traditionnels et habileté des artisans
Ce musée est la mémoire d’une région longtemps isolée dans ses montagnes. Les habitants ont créé un artisanat d’une qualité exceptionnelle. Les beaux chalets renfermaient les trésors d’un art de vie. On y découvre ainsi, avec étonnement et bonheur, des cuisines et des chambres à coucher que l’on croirait encore habitées, de nombreux objets du quotidien tels que vaisselle, meubles, bahuts typiques, poêles, outils, poteries, jouets, travaux de la paille, dentelles, cloches de vaches, premiers équipements pour les sports d’hiver (skis, luges, patins et raquettes à neige de la fin du XIXème siècle) …
Parmi ces richesses, on peut admirer la forge, la fromagerie d’alpage et la pièce consacrée aux débuts du tourisme : affiches, dessins, aquarelles et croquis qui étaient les souvenirs emportés par les touristes avant l’ère des photos et des cartes postales…
Les découpeurs du Pays-d’Enhaut
En Europe, les premiers découpages ont été réalisés il y a 400 ans environ. La technique arrivée de Chine s’est répandue dans différentes couches sociales : moniales, familles bourgeoises… Au XVIIIème, les portraits silhouettes étaient à la mode. Au XIXème, des artistes réputés ont développé le découpage en grand art.
Très tôt, deux artistes de la région ont choisi le papier et les ciseaux pour exprimer leur talent et leur sensibilité. Ainsi, Hans Jakob Hauswirth (1809-1871) a laissé un trésor d’art naïf empreint d’une symbolique vibrante. Ses tableaux nous transmettent l’amour que cet artiste longtemps resté discret portait à la nature et aux coutumes de son pays.
Né dans le Saanenland, il meurt dans la misère au devant de l’Etivaz. Entre sa jeunesse supposée dans le Simmenthal et sa vie d’homme mûr au Pays-d’Enhaut, on ignore où il a vécu. Les archives de la commune de Château-d’Œx mentionnent qu’un permis d’établissement lui a été refusé en 1847. Il a travaillé comme bûcheron et charbonnier dans la région de Rougemont, offrant ses services comme journalier dans les fermes du voisinage. Lorsque l’occasion se présente, il sort ses papiers et ses ciseaux, découpe à la veillée et laisse une découpure comme remerciement du repas qui lui est offert.
Après avoir créé des œuvres symétriques en noir-blanc, il évolue vers le collage de papiers de couleurs. Les découpages de Hauswirth enchantent, témoignage d’un esprit inventif et d’une âme sensible.
Les animateurs du Musée du Vieux Pays-d’Enhaut ont permis d’éviter que tout ce patrimoine artistique extraordinaire soit disséminé. On peut y admirer plus d’une trentaine de réalisations originales, aussi splendides qu’inattendues.
(Images : Johann-Jakob Hauswirth, 1858, Coll. Musée du Pays-d’Enhaut / Johann-Jakob Hauswirth, Coll. Musée du Pays-d’Enhaut, don de Mme Polly Guth / Louis Sauge, découpage sur papier, Coll. Musée du Pays-d’Enhaut, don de Mme Polly Guth)
Louis Saugy (1871 – 195) est né à Gérignoz, près de Château-d’Œx. Enfant, Louis voit ses parents créer ; sa maman, institutrice, dessine et son papa, paysan, découpe des silhouettes. Apèrs une formation de charpentier, il occupe dès 32 ans, la place de facteur à Rougemont. Lors de ses tournées postales il pénètre dans les chalets et peut admirer les découpages de Hauswirth qui ornent leurs murs. Cela ne sera pas sans influencer l’un de ses passe-temps favoris : le découpage.
Ses tableaux représentent souvent une montée à l’alpage agrémentée d’un bouquet et d’un cœur.
L’artiste découpe, vautré sur un canapé. Devant lui, une table sur laquelle il place un mince pupitre portatif vert. A l’aide de petits ciseaux pointus, il découpe des silhouettes. Une fois le thème général choisi, il place les pièces préalablement préparées, les manipule à l’aide de brucelles, y place une pointe de colle et les applique à l’aide d’une aiguille à chapeau.
Louis Saugy décède au début 1953, peu après l’incendie qui détruisit le centre du village de Rougemont. Il laisse derrière lui un témoignage inédit de l’évolution de sa région et pas moins de 60 tableaux anciens d’une grande qualité dans les locaux du Musée du Vieux Pays-d’Enhaut.
Dès l’époque de Saugy, les œuvres de découpage sur papier sont très prisées par les visiteurs de passage. La famille royale d’Espagne demande d’ailleurs un jour à voir le grand maître! D’autres découpeurs se font également connaître à cette époque parmi lesquels figurent Isaac Saugy, cousin de Louis Saugy, ainsi que Christian Schwizgebel.
Le Pays-d’Enhaut et la tradition du découpage
Les papiers découpés sont désormais une tradition au Pays-d’Enhaut. On compte une dizaine d’artistes qui confient au cutter ou au ciseaux l’expression de leur talent. Un corpus d’une centaine de découpages anciens et contemporains (Anne Rosat, Christian Schwizgebel et Marianne Dubuis, entre autres) fait la renommée du musée et fonde son expertise dans le domaine.
Si certains découpeurs préfèrent extraire leurs tableaux monochromes d’une feuille de papier, pliée en deux, sans adjonction de colle, d’autres ne sont pas sensibles à ce défi et assemblent les différentes parties de leurs réalisations préalablement découpées.
Prix du patrimoine vaudois
Tous les deux ans, Retraites Populaires mène une action de mécénat en faveur de la conservation du patrimoine vaudois. Le premier prix du Patrimoine vaudois 2015, a été décerné par la commission de sélection au Musée du vieux Pays-d’Enhaut pour son projet de Centre suisse du papier découpé.
Musée du Vieux Pays-d’Enhaut / Grand Rue 107 / 1660 Château-d’Œx
www.musee-chateau-doex.ch
(Texte et photos : Françoyse Krier)
Voir aussi :
https://www.fykmag.com/rougemont-balade-sur-les-traces-du-passe/
https://www.fykmag.com/chateau-doex-et-lesprit-de-la-tradition/
https://www.fykmag.com/chateau-doex-tradition-du-decoupage-famille-saugy/