Classée au Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1982, la Saline d’Arc-et-Senans a été édifiée entre 1775 et 1779 par l’architecte visionnaire Claude-Nicolas Ledoux. Une cité idéale imaginée par un architecte de génie, témoignage rare dans l’histoire de l’architecture industrielle.
« La forme de la saline est pure comme celle que décrit le soleil dans sa course ». Cette citation de son concepteur Claude-Nicolas Ledoux est reprise sur les murs des salles de la Saline royale d’Arc-et-Senans d’aujourd’hui.
Cavaliers et carrosses arrivaient par la rue Royale de cette ville à la campagne sise dans le Doubs, ayant pour vocation l’exploitation du sel, or blanc de l’époque, mais aussi l’hébergement des ouvriers. Ils étaient accueillis devant le pavillon d’entrée de la saline, dont la face extérieure est creusée en voûte de rocaille, rochers évoquant des cristaux de gemme, précédé par un péristyle de colonnes doriques.
Voyage dans l’univers de l’or blanc
Au XVIIIème siècle, les salines de Salins démontrent leurs limites. Pour répondre à la demande croissante en sel, notamment de la part du marché suisse, il faut augmenter la production. Les salines ne sont pas en mesure de faire face. Faute d’espace, elles ne peuvent pas s’agrandir ni se doter d’installations plus performantes et les ressources forestières doivent être prélevées de plus en plus loin. En 1773, l’administration des salines doit envisager la construction d’une nouvelle usine, à un endroit stratégique. Le site retenu, entre les communes d’Arc et de Senans, est bordé par la forêt de Chaux, 3ème forêt de France en feuillus, s’étendant sur près de 22’000 hectares, et proche des grands axes de communication routiers et fluviaux.Dépourvue de source salée, la nouvelle saline sera alimentée en saumure par une longue canalisation de 21 kilomètres en provenance de Salins-les-Bains : les saumoducs.
Pureté, beauté, efficacité
En 1774 – année de sa mort –, Louis XV appose sa signature sur les plans des Salines Royales de Chaux. Claude-Nicolas Ledoux, talentueux architecte, a convaincu le roi d’en faire une « Ville Idéale ».
Né en Champagne, en 1736, nommé Inspecteur des Salines de Franche-Comté en 1771, le jeune architecte du Roi, membre de l’Académie Royale, élabore en 1773 le plan de ce projet : la Ville Idéale sera construite – du moins la moitié du programme initial lequel devait former un cercle –, comportant également hôpitaux, ferme, boulangerie, jardins-ouvriers…
Premier objectif : les Salines. Car le cœur de la cité sera bel et bien une usine, soit onze bâtiments en pierre de taille calcaire du pays, recouverts de toitures en tuiles plates, et symétriquement disposés en cercle autour du Pavillon du directeur. Cette imposante construction, logis du représentant du roi, est flanquée d’un péristyle à fronton percé d’un oculus. Tout comme l’ensemble des bâtisses, les colonnes « baguées de bossages carrés » sont une véritable révolution architecturale, mais aussi source de polémique. Derrière ce pavillon, la belle Écurie destinée aux chevaux du directeur.
Bel ensemble à l’esprit palladien
De part et d’autre du pavillon directorial, deux vastes édifices – les Ateliers – où étaient traitées les eaux faiblement salées de Salins qui s’écoulaient jusqu’à l’usine par les saumoducs. Dans chacun de ces bâtiments se trouvaient quatre grandes poêles alimentés jour et nuit par les feuillus de la forêt de Chaux.
Aux extrémités, les Pavillons des Commis et de la Gabelle (occupé par le Fermier général chargé de prélever l’impôt). Face au pavillon directorial, un parfait demi-cercle comprend les logis parfaitement symétriques des gardes, des ouvriers, des tonneliers des forgerons avec leur forge, et même d’une prison. Au centre, le Pavillon d’entrée au péristyle majestueux.
Sur les murs des bâtiments ayant trait au travail du sel, un motif figuratif représente des urnes d’où jaillissent des coulées de sel fondu. Les Salines étaient alors entourées dans une haute enceinte, destinée à empêcher la fraude du sel. L’immense esplanade est divisée en deux quarts de cercle et séparée par une large avenue bordé d’arbres, de même que des chemins entre les bâtiments. Plus tard, la plupart de ces arbres devenus centenaires seront coupés.
Grandeur, déclin et reconversion
La production du sel se poursuivit à Arc-et-Senans jusqu’en 1884. Le rendement n’étant pas celui escompté, l’activité périclite. La concurrence du sel marin acheminé par chemin de fer et la pollution du puits alimentant le village d’Arc amènent la fermeture de la Saline en 1895. L’ensemble du site connaitra alors des fortunes diverses : incendie du pavillon central, colonnade dynamitée, bâtiments occupés par des réfugiés espagnols, puis par des prisonniers allemands… Situations peu favorables à la conservation de Monuments classés. Le transfert des haras de Besançon à Arc-et-Senans a été envisagé puis abandonné.
En 1927, le département du Doubs fait l’acquisition de la Saline d’Arc-et-Senans et entreprend sa restauration afin de rendre à ce magnifique ensemble tout son éclat. En 1920, un arrêté classe la Saline et son mur d’enceinte aux Monuments historiques. En 1982, la Saline d’Arc-et-Senans est inscrite sur la Liste du Patrimoine mondial de l’Humanité par l’UNESCO.
(Photos © Olivier Dargouge / Maquette Musée Ledoux et intérieur Berne 1 © Aurore Galland)
Expression de visions utopiques
Ouverte au public, la Saline est devenue un lieu de rencontres, de promenades et d’apprentissage, de résidences de chercheurs, d’expériences innovantes, d’expositions temporaires dans les bâtiments du sel – les Bernes – et parfois dans ses magnifiques caves. Lieu de transdisciplinarité propice au développement de projets artistiques, la Saline Royale d’Arc-et-Senans accueille régulièrement des artistes étrangers et français en résidence, dans le cadre de différents dispositifs d’échange. Ils ont alors à disposition un lieu de vie et de création, ainsi qu’un encadrement humain, qui optimisent les conditions de création.
Dans le bâtiment des Tonneliers, le musée Ledoux rend hommage à la carrière de l’architecte et présente l’une des plus importantes collections de maquettes d’architecture d’Europe.
On peut y voir notamment la maquette du Château de Bénouville, celle du théâtre de Besançon, dont l’architecte recevra la commande alors qu’il travaille à la construction de la Saline Royale à Arc-et-Senans. Ledoux pourvoie le parterre de fauteuils, offrant ainsi au public des places assises, ce qui n’était pas l’usage jusqu’alors, et place les musiciens dans une fosse d’orchestre, deux concepts tout à fait nouveaux. Inauguré en 1784, le théâtre fut victime d’un violent incendie en 1958, et la salle dut être reconstruite. Un grand nombre de ces maquettes ne fut jamais réalisé, comme le surréaliste Cimetière de Chaux, sorte de vaisseau spatial prêt à embarquer les âmes vers d’autres rives !
Une partie du pourtour de la Saline Royale est constituée de très beaux jardins où des expositions temporaires rythment les saisons, tel que le Festival des Jardins de juin à octobre. Surprises musicales et concerts sont proposées en août dans le cadre d’un partenariat tissé depuis 2009 avec le festival suisse des Jardins musicaux qui met à l’honneur la musique des XXème et XXIème siècles.
Lieu de vie et d’accueil
Une nuit à la Saline royale, un privilège accessible ! La Saline royale d’Arc-et-Senans est l’un des rares sites inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO à offrir des capacités d’hébergement classé Hôtel*** pour les groupes comme pour les visiteurs individuels.
De mars à octobre, des chambres rénovées par le grand architecte contemporain Jean-Michel Wilmotte accueillent les visiteurs qui peuvent ainsi profiter du calme du lieu, des jardins, de l’éclairage de nuit mettant en valeur les illustres bâtiments. Une occasion exceptionnelle de vivre une nuit à la Saline, dans les bâtiments des Gardes, des Berniers, de la Gabelle (occupée jadis par le Fermier général), d’assister au coucher du soleil, une expérience insolite pour découvrir la magie de ce site unique où tout est symétrie, calme et beauté.
Petit déjeuner copieux à la table des Jardins de la Saline royale sous la charpente avec vue sur une impressionnante hélice de dirigeable : en 1972, Serge Antoine, alors président de la Saline et ordonnateur des conditions de vie de cette structure, était un passionné de dirigeables, raison pour laquelle est née la tradition d’organiser chaque année, en septembre, une Fête des montgolfières.
Ainsi, le Club de montgolfières Vents du Futur, un des plus anciens clubs aérostatiques de France basé à Arc-et-Senans, annonce la Fête des montgolfières 2017 qui aura lieu le samedi 16 septembre dans ce cadre magnifique !
Une adresse de charme, entre tradition et créativité
Situé à 5 km des Salines Royales et à 10 km des salines de Salins-les-Bains, Le Bistrot de Pontarlier à Port-Lesney est un endroit convivial au bord de la Loue. A ne pas manquer…
La gastronomie y est goûteuse avec des plats régionaux incontournables et des recettes plus innovantes, servie dans un décor de bistrot au cachet authentique. Des nappes à carreaux rouge et blanc donnent à l’ensemble des airs de guinguette.
Le Chef Julien Zangiacomi privilégie les plus beaux produits, sélectionnés avec soin pour leur fraîcheur et leur qualité. Volaille au vin jaune et morilles, grenouilles fraîches, friture d’ablettes, truite au savagnin… et l’incontournable Paris-Brest (pour 2 !). sont quelques-unes des spécialités de ce lieu sympathique.
Dès le printemps, un tulipier centenaire ombrage la jolie terrasse.
Le Bistrot de Pontarlier / Place du 8 mai 1945 / 39330 Port-Lesney
www.bistrotdeportlesney.com
Académicien et plusieurs fois ministre, Edgar Faure fut à deux reprises élu maire de Port-Lesney où il vécut pendant plusieurs années dans une magnifique demeure du XVème siècle.
Texte et photos sans mention : Françoyse Krier
Saline Royale / 25610 Arc-et-Senans
Un lieu unique à découvrir toute l’année
www.salineroyale.com
www.doubs.travel
www.jura-tourisme.com
Voir aussi :
https://www.fykmag.com/le-sel-or-blanc-de-salins-les-bains/
https://www.fykmag.com/salins-les-bains-tourisme-thermalisme-et-sante/