A l’occasion de son dixième anniversaire, la Cité de la dentelle et de la mode propose une carte-blanche au créateur belge Olivier Theyskens qui, dans une exposition originale à admirer du 15 juin 2019 au 5 janvier 2020, se livre à une rêverie dont le vêtement est l’acteur principal.
Proposition esthétique inédite, conçue comme une expérience émotionnelle, « In praesentia » est un projet construit par fragments et par collisions, inspiré par un dialogue créatif entre l’œuvre singulière d’Olivier Theyskens et les collections historiques, textiles et industrielles du musée.
Hors des schémas temporels, délaissant les classiques rétrospectives chronologiques comme les thématiques trop explicites, c’est à une célébration – celle du regard et de la pensée vagabonde – que cette exposition invite « In praesentia », comme une figure métaphorique, évoque la correspondance imaginaire, sensible et plastique, qui s’invente dans ce cadre : d’un côté, une œuvre qui s’est construite depuis 20 ans comme une exploration continue du monde mystérieux du vêtement dans toute sa densité : formes, textures, tonalités, construction, symbolique, mouvement, plasticité, allure, de l’autre, des collections reposant dans le silence des réserves du musée depuis 10 ans, des œuvres recouvertes de cette patine du temps qui poétise notre relation à l’histoire.
Sensuel mais non tapageur, percutant mais non provocant, moderne mais non opportuniste, créatif au-delà de la mode, Olivier Theyskens pose un regard amoureux sur les choses et les êtres, saisissant la poésie de l’infime qui inspire sa création. Cette même vision nourrit son approche des œuvres conservées par le musée, qu’il s’agisse des collections textiles ou celles industrielles, témoins de la riche histoire de la dentelle à Calais.
Le regard du créateur fouille, scrute, sonde, se déplace de l’un à l’autre : un pli particulier, une association inattendue de couleurs, un détail infime, un monogramme brodé, le bruissement d’une étoffe, le monde sombre de l’atelier recouvert de poussière de graphite, la fragilité, la délicatesse des arabesques de dentelle qu’il fait naître. Des univers s’entrechoquent, se répondent, se complètent par enchantement, ravissement. Le musée devient alors lieu de création, matrice qui fait éclore de nouvelles associations, suscite des scénarios inédits, autant de scènes poétiques restituant une présence à des objets oubliés ou délaissés, à la gloire éphémère passée, témoins de vies minuscules, riches trésors de la mémoire collective.
Olivier Theyskens
Né en 1977, le couturier belge – aux origines normandes par sa mère –, fait ses débuts en 1997, et, dès son premier défilé parisien, son talent précoce bénéficie d’une attention internationale, notamment grâce à Madonna qui porte une de ses créations à la cérémonie des Oscars en 1998.
Olivier Theyskens est venu à la dentelle – matière aimée pour sa noblesse – , par les vieux coupons et rubans trouvés dans les greniers familiaux. Elle occupe de fait une place de choix dès ses toutes premières collections en 1998, été comme hiver : érotisant une allure faussement ingénue de ton ivoire, livrant un corps corseté, nu sous sa transparence obscure, rehaussant une broderie à motif de coeur, servant même de pochoir pour décorer à la bombe une veste, ou composant encore un manteau sans manches aux allures de méduse générée par un nombre impressionnant d’étroits rubans patiemment assemblés…
Sa notoriété ne cessera de grandir tout au long de sa carrière, riche de plusieurs aventures créatives, au sein de sa marque éponyme, ou de Rochas et Nina Ricci, ces maisons « belles endormies » de la Couture française dont il assure successivement la relance avec brio au cours des années 2000, ou encore de la marque américaine grand public Theory, à qui il insuffle une touche parisienne.
Les dentelles anciennes mises à part, Theyskens noue des relations particulières avec quelques dentelliers historiques : Marco Lagattolla en Italie pour ses dentelles de soie, Sophie Hallette à Caudry, notamment pour faire revivre le dessin emblématique de la maison Rochas, mais aussi Darquer, à Calais, maison la plus ancienne de la place, fondée en 1840.
Olivier Theyskens déploie un style singulier : une association subtile de recherche de liberté et d’un esprit Couture, traversée par une grande sensibilité artistique et une exigence de perfection technique constamment renouvelée. Proclamé le « prince gothique » de la mode par les médias, son esthétique de romantisme sombre est notamment reflétée dans ses silhouettes « dramatiques » souvent réalisées en noir, une teinte dont il saura magnifier toutes les valeurs et textures, où la dentelle y tient une place de choix.
Tout au long de sa carrière, Olivier Theyskens a collaboré avec des artistes, créant les costumes pour le groupe de rock The Smashing Pumpkins, pour le Théâtre de la Monnaie à Bruxelles et pour le Ballet de la ville de New York. Il habille de nombreuses célébrités et une élite cosmopolite.
La Cité de la dentelle et de la mode fête ses dix ans en 2019. Pour célébrer son anniversaire,
le musée se veut audacieux et met à l’honneur ses thématiques phares que sont la dentelle et la mode, en proposant une immersion dans la création actuelle à travers une exposition de mode et un accrochage inédits : Dentelle etc., visible jusqu’au 1er mars 2020, Olivier Theyskens
«In praesentia» – Exposition du 15 juin 2019 au 5 janvier 2020, ainsi qu’une programmation festive selon le principe dix ans / dix rendez-vous, qui démarrera à la Nuit des Musées
(Crédits photos : Julien Claessens et Thomas Deschamps).
Olivier Theyskens «In praesentia»
Cité de la dentelle et de la mode
135 quai du Commerce – 62100 Calais
Visuels : Ensemble robe, veste et crinoline en taffetas de soie moirée // Robe à tournure en taffetas, franges de passementerie, ruban, boutons en métal, dentelle type application – Vers 1875 Collection Cité Dentelle // Robe bustier à tournure en soie // Jupe et corsage en satin cuir de soie // Manteau en soie crue et robe guepière en satin // Manteau en lin enduit // Chemise en organza de soie et agrafes // Corset en sergé de coton, tulle mécanique vers 1900 Collection Cité Dentelle // Affiche : Manteau sans manches entièrement composé de rubans de dentelle.
Voir également :
https://www.fykmag.com/calais-la-cite-de-la-dentelle-et-de-la-mode-fete-ses-dix-ans/