LE PALAIS MENCHIKOV

Situé le long de la Neva, sur l’île Vassilievski, le Palais Menchikov fut le premier bâtiment en pierre et l’un des premiers palais de la ville. Fondé en 1710 pour être la résidence du gouverneur général Alexandre Danilovitch Menchikov, sa construction a continué jusqu’en 1727, lorsque Menchikov et sa famille ont été exilés en Sibérie et leurs biens confisqués. En 1731, les corps des Cadets ont occupé les bâtiments du palais et les résidences voisines.

PALAIS MENCHIKOV plafond en carreaux de faïence PALAIS MENCHIKOV une salle en carreaux de faïenceMélange de baroque italien et de classicisme français, c’est la seule habitation particulière de cette époque qui ait survécu. A l’origine, l’édifice était beaucoup plus somptueux et de par ses dimensions et sa richesse, surclassait les appartements du tsar. A l’entrée principale, un perron élevé était orné de colonnes. Au-dessus, sur un balcon, un orchestre accueillait les invités. La façade resplendissaient sous la dorure ! Un escalier d’honneur descendait vers la Neva et l’accès se faisait en barque – une gondole en bois sculpté doré. Le domaine de Menchikov comportait encore une chapelle, des bâtiments domestiques, des moulins à vent, un jardin à la française…
C’est dans ce palais qu’avaient lieu les réceptions d’ambassadeurs étrangers et les assemblées solennelles. Après la disgrâce de Menchikov, le palais abrita une Ecole militaire, ce qui nécessita la construction de bâtiments supplémentaires érigés à des époques différentes.

PALAIS MENCHIKOV enfilades de salles en carreaux de faïencePALAIS MENCHIKOV détail des carreaux de faïencePALAIS MENCHIKOV meuble précieux Actuellement, musée de la culture russe du premier tiers du XVII siècle, ce palais appartenait à Alexandre Menchikov, général et premier gouverneur de la ville, qui fut l’ami de Pierre le Grand. Il y donna les premiers bals et fêtes de la ville. Construit par des architectes européens, il renferme à l’intérieur des éléments russes et un grand nombre de sculptures sur bois. On peut y admirer la cuisine du palais avec son plancher de marbre, dans laquelle des cuisiniers français préparaient les dîner d’apparat, ainsi que les salles ornées de tableaux et de sculptures et surtout les «Intérieurs des carreaux» : chaque pièce est décorée de magnifiques carreaux de faïence qui diffèrent par leur sujet et leur composition. Les carreaux les plus jolis se trouvent dans «l’appartement de Varvara», la belle-sœur de Menchikov, qui a consacré sa vie à la famille et aux enfants de sa sœur. Ces carreaux de faïence décoraient 11 pièces du palais mais seules 4 d’entre elles sont subsisté. Les 27’810 carreaux, tous peints à la main, provenaient de Delft en Hollande, mais dès 1720 on commenca à les fabriquer à Saint-Petersbourg. Menchikov qui avait ses propres maitres-artisans en fit placer même aux murs et dans sa chambre à coucher qui était entièrement recouverte.

PALAIS MENCHIKOV cuisine PALAIS MENCHIKOV salle à mangerHomme politique et chef militaire, Alexandre Danilovitch Menchikov (1672-1729) est présenté au jeune Pierre Ier. Les deux hommes deviennent amis et Pierre le fait entrer dans un régiment qu’il vient de créer pour en faire sa garde personnelle.

Lorsque Pierre le Grand prend définitivement le pouvoir, en 1694, Menchikov devient son collaborateur favori lequel se distingue par son ambition démesurée, son goût du luxe et son dévouement pour son maître. En 1697, il accompagne Pierre  lors de son long voyage d’études et de connaissances à travers l’Europe. En 1700, Menchikov démontre de bonnes capacités militaires lors de la guerre avec la Suède.

Après s’être illustré lors de batailles importantes, devenu maréchal, il conquiert la Courlande en 1710. En 1713, il fait campagne en Poméranie. A la fin de la guerre, la Baltique est russe de la Carélie à la Pologne. En 1725, Pierre Ier meurt sans désigner de successeur. Menchikov prend parti pour Catherine Ière, sa veuve,  qui, en partie grâce à lui, est couronnée impératrice. C’est à cette époque qu’il détient le plus de pouvoir. Sous son conseil, elle crée le Haut conseil secret.

PALAIS MENCHIKOV statue Vénus dans un coquillagePALAIS MENCHIKOV statue femme Noire

 

PALAIS MENCHIKOV entréeMenchikov voit ainsi son avenir et celui de sa famille assurés. Il convainc Catherine Ire de désigner Pierre, fils d’Alexis Petrovitch, comme successeur et fiance l’héritier à sa fille Maria. Lorsque l’impératrice meurt à son tour, en mai 1727, il est désigné tuteur du nouvel empereur Pierre II qui le nomme généralissime.

Son arrogance sera la cause de sa chute. Le prince Alexis Dolgorouki, nouveau membre du Haut conseil secret, parvient à persuader Pierre II de la malhonnêteté de Menchikov. Le 20 septembre, il est arrêté et déchu de tous ses titres. Ses biens sont confisqués. Après un court procès, il est déporté avec sa femme et ses enfants à Beriozovo en Sibérie occidentale où il décèdera dans la pauvreté en novembre 1729. La femme de Menchikov mourut avant d’arriver en Sibérie, sa fille Marie, 16 ans, qui avait été la promise du tsar Pierre II, mourut de tuberculose. Son fils et sa seconde fille revinrent d’exil en 1731.

En 1924, les collections du palais ont été déplacées à l’Ermitage et vers d’autres musées. De 1956 à 1981, le palais Menchikov a été restauré et ouvert au public comme branche du musée de l’Ermitage avec une collection d’art russe de la fin du XVIIème-début du XVIIIème siècle.

 

LE PALAIS YOUSSOUPOV

L’ancien palais des princes Youssoupov sur le quai de la rivière Moïka est l’un des bâtiments les plus visités de la ville. Le palais était autrefois la résidence principale des Ioussoupov, une des familles les plus riches de l’aristocratie russe. Il est célèbre pour avoir été le théâtre de l’assassinat de Raspoutine.

Construit en 1770 par l’architecte français Vallin de La Mothe et modifié au fil des ans, le palais a appartenu, de 1830 à 1917, à la famille des Youssoupov connue pour sa philanthropie et ses collections d’art et qui possédait la seconde plus grosse fortune de Russie à la veille de la révolution.

LE PALAIS YOUSSOUPOV Zinaida Yusupova by V.SerovLE PALAIS YOUSSOUPOV une salle aux portraits

Portrait de Zinaida Yusupova by V. Serov
Magnificence d’une salle du Palais Youssoupov

 

 

 

 

 

 

 

 

Zénaïde Youssoupov
Elle était l’unique héritière de l’illustre et riche famille Youssoupov qui possédaient des domaines totalisant 2’000 km2 de terres, avec usines sucrières, moulins,  briqueteries, mines de charbon, distilleries, usines textiles et  une collection d’art et de bijoux accumulée par ses ancêtres. Les Youssoupov possédaient seize châteaux ou palais. (Portrait de Zinaida Yusupova by V.Serov)

Belle, cultivée, raffinée et mondaine, la princesse qui parlait français, s’exprimait aussi en anglais et en allemand, parcourait les villes d’eaux, les capitales et les Cours européennes, épousa le comte Soumarokov-Elston dont elle eut deux fils : Nicolas (1883-1908) qui mourut lors d’un duel, et Félix (1887-1967), connu  pour sa participation à la conjuration contre Raspoutine, et qui épousa la princesse Irina Alexandrovna, nièce de Nicolas II. Tous deux étaient d’une grande beauté.

LE PALAIS YOUSSOUPOV Félix et sa femme IrinaFélix Youssoupov
Zénaïde, la mère de Félix avait été déclarée indésirable à la Cour après avoir demandé à la Tsarine de renvoyer Raspoutine. Son père, le général Youssoupov, gouverneur-général de Moscou, avait été limogé en 1915 pour avoir critiqué le régime impérial. En 1916, Félix entend une conversation concernant “Grichka” (diminutif de Gregori) Raspoutine. Quelques-unes des raisons qui lui font prendre la décision d’empêcher aussitôt que possible le staretz de nuire à la sainte Russie. Pour cela, Félix commence, malgré sa répulsion pour Raspoutine, à se lier avec lui sous de faux prétextes. Puis il cherche des complices qui pourront lui venir en aide pour mener à bien son entreprise.

Dans la nuit du 16 décembre 1916, le grand-duc Dimitri Pavlovitch, cousin du tsar, et lui-même invitent Raspoutine au palais. Ils servent à Raspoutine des gâteaux et du vin avec une dose de poison suffisante pour tuer cinq hommes. Constatant que le poison ne semble avoir aucun effet sur Raspoutine, Youssoupov sort un pistolet et lui tire dans le dos. Le croyant mort, les deux hommes quittent la pièce, puis revenant un peu plus tard sur les lieux, Ioussoupov trouve Raspoutine tentant de se relever et de fuir. Félix et ses complices tirent à trois reprises sur Raspoutine, mais celui-ci tente toujours de se relever. Il le frappent alors à la tête avec une barre de fer puis le roulent dans une couverture avant de le jeter dans les eaux glacées de la Moïka.

LE PALAIS YOUSSOUPOV salle où fut assassiné RaspoutineSelon l’autopsie pratiquée par la suite, Raspoutine ne serait mort ni du poison ni des multiples blessures occasionnées par les balles et les coups de barre de fer mais… d’hypothermie. Selon certains historiens, le médecin Lazovert, chargé de livrer le poison, aurait eu des scrupules, et l’a remplacé par un produit inoffensif. Selon d’autres, les balles mortelles ont été tirées par le Grand Duc, et non par Ioussoupov, qui a “endossé” le meurtre pour éviter un scandale à la famille impériale.

Il y n’y eut pas de procès, il y eut une conspiration du silence. Le Grand Duc (comme Youssoupov) a été exilé par le tsar, et cet exil lui a valu de ne pas être arrêté par les Bolcheviks, et d’avoir la vie sauve.

 

L’exil en France…
En 1920, le prince Youssoupov s’établit avec sa femme à Paris où il crée en 1924 la maison de couture Irfé. Son épouse lui sert de mannequin pour présenter les modèles de ses collections. La fortune colossale des Youssoupoff avait été confisquée par les Soviets et les avoirs placés à l’étranger avaient été rapatriés dès 1914 pour des motifs patriotiques. Mais les Youssoupov réussirent à sauver nombre d’objets précieux – deux Rembrandt , vendus au début des années 20 et une célèbre perle, vendue en 1953. Ami de Kessel, Cocteau ou du comte Boniface de Castellane, il resta jusqu’à sa mort une des grandes figures de l’émigration russe et de la société mondaine parisienne. Il repose au cimetière russe de Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne) ainsi que son épouse la princesse Irina Alexandrovna.

La Révolution d’Octobre eut lieu peu après l’assassinat de Raspoutine. Le palais Youssoupov fut nationalisé et réquisitionné par le commissariat de l’Éducation de la ville en 1925. Aujourd’hui, le palais est utilisé comme palais de la culture pour les enseignants et de musée consacré au mode de vie de la noblesse russe avant la révolution. On peut également se rendre au palais Youssoupov pour assister à des spectacles dans ce qui fut le magnifique théâtre privé, au décor enchanteur.

En 2004, Xenia Sfiris, unique héritière de Félix Youssoupov, a demandé à la Fédération de Russie de lui restituer une partie de la fortune familiale. Elle conclut sa lettre au président Poutine en faisant part du fait que lors de ses visites à Saint-Pétersbourg, elle soit contrainte de descendre à l’hôtel au lieu de résider dans l’un des palais familiaux. Ces démarches n’ont naturellement abouti qu’à un refus des autorités russes. Un oukase spécial de Vladimir Poutine lui a rendu la citoyenneté russe en 2000. L’héritière des Youssoupov préside l’Association française des amis du théâtre Mariinsky. Depuis la mort de Félix Félixovitch, personne n’a été autorisé à relever le titre de prince Youssoupov.

Textes et photos (Palais Menchikov) : Françoyse Krier

LE PALAIS YOUSSOUPOV le théâtre privéLE PALAIS YOUSSOUPOV façade

 

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